Les 6 et 7 juin 2019 aura lieu un colloque international co-organisé par Leora Auslander, Naomi Davidson, Florence Rocherfort, et Michelle Zancarini-Fournel, dont voici l’argumentaire:
CONTROVERSES SUR LA CANTINE : Laïcités, religions, nations, XIXe-XXIe
Université de Chicago, Centre à Paris et Groupe Sociétés Religions Laïcités (CNRS, EPHE, PSL), LARHRA .
Co-organisatrices :
Leora AUSLANDER, Directrice académique, 2018-2019, Université de Chicago, Centre à Paris ; Arthur and Joann Rasmussen Professor, University of Chicago
Naomi DAVIDSON, Visiting Senior Research Associate, 2018-2019, Université de Chicago, Centre à Paris ; Associate Professor, University of Ottawa
Florence ROCHEFORT, Chargée de recherche CNRS GSRL (CNRS/EPHE/PSL)
Michelle ZANCARINI-FOURNEL, Professeure émérite Université de Lyon I, LARHRA
Lieu : Université de Chicago, Centre à Paris. 6, rue Thomas Mann, 75013
Dates : 6-7 Juin, 2019
La cuisine et les pratiques alimentaires fonctionnent comme pierres angulaires de l’identité française depuis le 18ème siècle. L’importance accordée à la question de quoi, quand et comment manger révèle la conviction que la nourriture joue un rôle d’intégration à la nation. Manger ce qu’il faut, quand il faut, comme il faut, doit s’apprendre depuis le plus jeune âge. Pour certains, peut-être la majorité des habitant.e.s du territoire, ces normes alimentaires dites « françaises » paraissent complètement naturelles ; pour d’autres, héritiers.ères des traditions régionales, immigré.e.s, appartenant.e.s à des religions autres que le catholicisme, ou végétariens ou véganes, ces normes sont problématiques. La dernière décennie a vu des conflits aigus entre des acteurs.rices sur la scène politique qui se construisent comme défenseur.e.s de l’identité française et ceux et celles qui cherchent à respecter d’autres pratiques alimentaires tout en étant bien français.es. Ce colloque international propose une mise en perspective historique des conflits actuels, en se focalisant sur la cantine.
Depuis 20 ans, de plus en plus d’élèves français.e.s refusent les repas proposés aux cantines. Ces refus se font dans le contexte des débats beaucoup plus larges sur la laïcité, « l’intégration » de certaines populations, et la solidarité nationale, où manger ou refuser de manger certains aliments ne serait qu’une des pratiques corporelles qui troublent l’ordre républicain. Le désir de se vêtir, se laver, ou se nourrir selon ses croyances religieuses ou éthiques, surtout quand on est jeune, provoque de nouveaux débats et de nouvelles réponses de la part des responsables municipaux, des directrices et directeurs d’école, des associations, et des familles. Mais ces débats ne datent pas du très contemporain : dès les années soixante certaines familles ont déjà revendiqué la possibilité de manger autrement à la cantine. Comment, et pourquoi, est-ce que la nourriture est devenue un élément si important dans les débats autour de la présence du corps pratiquant dans une société dite laïque ?
La cantine scolaire, et le repas de midi qui y est servi, est un espace central dans la construction d’un habitus national républicain et, en principe, laïque. Le déjeuner à la cantine est donc un lieu pour inculquer les valeurs françaises aux enfants. Si plusieurs générations d’historien.ne.s ont élucidé les manières dont l’école publique était censée façonner des citoyen.ne.s républicain.e.s depuis les années 1880, cette pratique alimentaire quotidienne d’initiation et d’intégration n’a pas encore fait l’objet de la recherche scientifique qu’elle mérite. Pendant ces deux jours, nous souhaitons identifier de nouvelles pistes de recherche pour aborder ces questions à partir des travaux historiographiques, ethnographiques, littéraires, et sociologiques sur la cuisine « française » ; la nourriture dite « religieuse » entre public et privé au passé et au présent ; et le corps « pratiquant » comme cible d’intervention étatique. Pour élargir les cadres de ces discussions ; des practicien.ne.s venue.s des écoles, et des mairies et des institutions aborderont ces mêmes questions et des chercheuses/chercheurs évoqueront des comparaisons transnationales ainsi que d’autres controverses politico-religieuses.
Inscription : https://uchicagoparis.eventbrite.fr